L’obligation d’information du notaire n’efface pas l’obligation de conseil de l’entrepreneur

Cass, 3e civ, 15 octobre 2015, n°14-24-553

L'obligation de conseil du maître d’œuvre

La cour de cassation s’est récemment prononcée sur la question de l’obligation de conseil du maître d’œuvre, et notamment en présence du Notaire. Tel est l’objet de l’arrêt rendu par la troisième chambre civile de la Cour de Cassation en date du 15 octobre 2015.

Les faits sont les suivants : un couple fait l’acquisition d’une maison par acte notarié, et souhaite réaliser une extension. Les propriétaires confient donc les travaux à un entrepreneur, et le projet de construction prend forme. Au cours de l’exécution des travaux, les propriétaires sont assignés par leurs voisins, propriétaires de la parcelle mitoyenne, en vue de la démolition du bâtiment.

Le litige s’est élevé devant la Cour d'Appel, laquelle a condamné solidairement l’entrepreneur et le Notaire rédacteur de l’acte de vente à garantir les propriétaires de toutes les condamnations prononcées contre eux, y compris les frais de démolition de l’extension, et la somme de 35 338.86€ à titre de dommages-intérêts. L’entrepreneur s’est pourvu devant la Cour de Cassation.

Ce dernier soutient d’une part que le Maître d’œuvre n’est pas tenu, sauf convention spéciale, de vérifier les titres de son client. D’autre part, que le titre de propriété du Maître de l’ouvrage contenait des clauses relatives à la présence de servitudes rédigées de manière ambigüe et contradictoire.

La cour de cassation rejette le pourvoi de l’entrepreneur.

En effet, elle constate que, lors de la réalisation des travaux, l’entrepreneur avait pris appui sur un mur privatif contenant des ouvertures obturées par des parpaings. Malgré cet indice matériel de nature à soulever la question des limites de propriété et des servitudes pouvant exister sur ces deux fonds mitoyens, l’entrepreneur n’a pas consulté le titre de propriété du maître de l’ouvrage.

En conséquence, la Cour d'Appel  a déduit à bon droit que celui-ci a manqué à son obligation de conseil en n’attirant pas l’attention du Maître de l’ouvrage sur les risques d’édifier une construction en violation des droits du propriétaire du fonds voisin.

Cette jurisprudence rappelle une nouvelle fois l’importance de l’obligation d’information et de conseil du professionnel face au particulier profane. Le maître d’œuvre a en charge la partie intellectuelle de la réalisation de la construction, et bien souvent la direction du chantier. Dans ce cadre, il lui appartient de faire une étude rigoureuse du titre de propriété qui constitue le document de base à l’acte de construction.

L’obligation de conseil qui incombe au professionnel de la construction implique d’effectuer toutes les démarches et recherches utiles à la bonne réalisation de l’ouvrage. Toutefois, cette décision semble sévère dans la mesure la responsabilité du Notaire n’est pas davantage sanctionnée que la responsabilité du maitre d’œuvre. Il ressort de la décision que l’acte notarié manquait de clarté s’agissant des servitudes grevant le fonds.

Le Notaire à également une obligation d’information et un devoir de conseil particulièrement poussé, car son rôle est d’assurer la légalité et le respect des actes qu’il rédige. Ce dernier aurait  donc dû demander à ses clients quels projets ils envisageaient de réaliser sur le bien objet de l’acquisition, ce qui aurait permis d’éclairer en amont les acquéreurs sur les possibilités de construction offertes par la situation juridique du bien.

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