Par un arrêt rendu le 5 mai 2021, la première chambre civile de la Cour de cassation a précisé les conséquences d’une situation de convention d’assistance bénévole.
En l’espèce, le 17 septembre 2011, plusieurs personnes (assistants) ont, bénévolement, participé au tri et rangement d’affaire d’une autre personne (assisté) à son domicile. A cette occasion, l’un des assistants a jeté un carton de 30 kg depuis le balcon du deuxième étage. Cependant, un autre assistant se trouvait en dessous et a été grièvement blessé. L’assureur de l’assisté a alors accordé une provision à la victime, puis s’est retourné contre l’assistant qui a jeté le carton.
Un premier jugement a été rendu, et un appel, interjeté.
Par un arrêt du 11 juin 2019, la Cour d’appel de Nancy a retenu un partage de la responsabilité entre l’assisté et l’assistant qui a jeté le carton, estimant que la situation pouvait être qualifiée de « convention d’assistance bénévole ». Elle a alors considéré que l’assisté et bénéficiaire du contrat d’assistance bénévole était responsable à 70%, et que l’assistant ayant jeté le carton était responsable à hauteur de 30%.
L’assureur de l’assisté a formé un pourvoi en cassation.
Et, par un arrêt du 5 mai 2021, la Cour de cassation a confirmé l’arrêt de la Cour d’Appel et rejeté les prétentions de cette assurance.
La convention d’assistance bénévole et ses conséquences
En droit, en principe, une personne qui cause un dommage à autrui a l’obligation de le réparer. Cette responsabilité délictuelle permet donc à toute victime d’un préjudice subi par un tiers d’être indemnisée.
Par exemple, en l’espèce, l’assistant qui a jeté le carton du deuxième étage est responsable du préjudice subi par l’assistant blessé par ce carton, sur le fondement de cette responsabilité délictuelle.
Cependant, il existe aussi d’autres fondements susceptibles d’engager la responsabilité d’une personne. Parmi eux, figure la convention d’assistance bénévole.
La convention d’assistance bénévole est une notion juridique construite par la jurisprudence, non codifiée, et qui a subi de nombreuses évolutions.
La finalité de cette convention est de garantir la réparation des dommages corporels subis par une personne qui porte assistance à une autre. Ainsi, en présence d’une convention d’assistance bénévole, l’assisté est obligé à réparer les dommages subis par un quelconque assistant à l’occasion de son geste d’assistance.
L’exemple type ayant conduit à la création de ce contrat est l’aide apporté par un assistant à une personne en train de se noyer ou victime d’un accident mettant sa vie en danger. Grâce à cette convention, l’assistant peut toujours bénéficier d’une réparation des dommages subis si, lorsqu’il a porté assistance, un préjudice lui a été causé.
Cependant, la convention d’assistance bénévole est aujourd’hui appliquée dans bien d’autres situations. Tel fût le cas en l’espèce, où l’assistance se limite à du tri et du rangement d’affaire pour autrui.
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L’appréciation de la responsabilité de l’assisté
En l’espèce, la qualification de la situation comme convention d’assistance bénévole n’a pas été contestée.
Cependant, l’assurance de l’assisté sollicitait que la faute délictuelle commise par l’assistant, qui a jeté le carton, empêche de mettre en cause sa responsabilité contractuelle. En d’autres termes, il était demandé aux juges de considérer que l’assisté ne pouvait être tenu pour responsable, même en partie, d’une faute commise par un assistant qui a manqué de diligence, en jetant un carton du deuxième étage sans vérifier que personne ne se trouvait en-dessous.
En effet, si la responsabilité de la personne qui a jeté le carton est évidemment engagée, reste à savoir si la personne dans l’intérêt duquel le carton a été jeté est aussi responsable.
Pour la Cour de cassation, l’assisté a, lui aussi, engagé sa responsabilité puisque « en tant qu’assisté et organisateur des travaux entreprise dans son intérêt, [il] a commis une faute contractuelle en donnant à [son assistant] un ordre dont les conséquences pouvaient être dangereuses pour les personnes, sans l’accompagner d’une quelconque consigne de sécurité ».
En d’autres termes, la Cour de cassation retient que l’assisté a commis une faute, en manquant à son obligation de diligence, qui découlait du contrat d’assistance bénévole.
Ainsi, s’il avait pu rapporter la preuve qu’il avait effectivement accompagné son ordre de consignes de sécurité claires et précises, sa responsabilité n’aurait peut-être pas été retenue.
Tel n’a pas été le cas en l’espèce, puisque la Cour de cassation reprend l’analyse de la Cour d’appel, et considère que l’assisté est majoritairement responsable du dommage causé par le carton (70%), et que son assistant, ne l’est qu’à hauteur de 30%.
Si la solution rendue par la Cour de cassation est logique, elle peut sembler particulièrement sévère pour l’assisté, tenu majoritairement responsable des dommages causés par un carton qu’il n’a pas jeté.
Il convient donc de connaître ses droits, mais aussi ses obligations, afin de prévenir tout risque d’engager sa responsabilité. Et ce, même à l’occasion d’évènements de la vie quotidienne, tel qu’un déménagement.