Dans un arrêt récent de la deuxième chambre civile de la Cour de Cassation du 24 novembre 2011, la Cour suprême est revenue sur sa jurisprudence classique selon laquelle il n’y aurait pas d’obligation pour la victime de minimiser son dommage en matière de responsabilité contractuelle.
La doctrine s'accorde naturellement à critiquer cette décision qui va à l'encontre du sacro saint principe de la réparation intégrale du préjudice au terme duquel l'intégralité des conséquences dommageables doit être normalement réparée par le responsable.
En effet, cet arrêt nous informe, par une interprétation à contrario, que si la victime a, par sa faute, aggravé son dommage, elle peut être privée d'indemnisation.
Néanmoins, il faut tempérer la portée de cette jurisprudence qui ne concerne pour l'instant seulement la responsabilité contractuelle et pas encore la responsabilité délictuelle.
Heureusement, cette jurisprudence ne s'applique pas aux dommages corporels (voir Cass. Civ 2e, 19 juin 2003 où la haute Cour avait considéré qu'il ne pouvait être reproché à la victime contaminée par le virus de l'hépatite C de refuser de subir de nouveaux traitements pour supprimer ou même seulement réduire son droit à indemnisation)
Ce principe consacré par la Cour de Cassation existe pourtant déjà en matière de droit des assurances maritimes et a été prévu dans plusieurs régimes juridiques européens (anglais, allemand, Suisse) et on peut aisément imaginer que les magistrats du Quai de l’horloge ont voulu y faire écho.
En l’espèce, la Cour de Cassation s'est ici prononcée sur la réparation du préjudice matériel de jouissance d'un bien en matière de responsabilité contractuelle. Elle reproche ici au juge du fond de ne pas avoir caractérisé une faute de l'assuré pour écarter la réparation du préjudice résultant de son impossibilité de jouir de son véhicule, et qui ne saurait donc être déduite du seul constat qu'il n'établit pas avoir été empêché de l'utiliser en l'assurant auprès d'un autre assureur.
Il en résulterait a contrario que l'indemnisation de la victime peut être limitée lorsqu'elle n'a pas, par son comportement fautif, pris les mesures nécessaires pour éviter l'aggravation de son dommage.
Dés lors, cette jurisprudence va ouvrir de nombreuses portes aux responsables et à leurs plaideurs qui vont chercher coûte que coûte à démontrer des fautes des victimes pour tenter de minimiser les préjudices subis.
Cette évolution de la jurisprudence est particulièrement défavorable pour les victimes et ne peut qu’être critiquée. Il conviendra dés lors que la Cour de Cassation délimite strictement cette nouvelle évolution pour ne pas mettre à mal plus encore le principe de réparation intégrale du préjudice déjà bien entamé par la Cour de Cassation.
Restons vigilant !!!!
Jean Mathieu LASALARIE