La croisière ne s'amuse plus...

10 000 euros à la victime en réparation de ses préjudices financiers et moraux.« Intoxication alimentaire au cours d’une croisière maritime »

A l’heure des préparatifs des vacances estivales, il est bon de prendre connaissance de la solution récemment rendue par la première chambre civile de la Cour de cassation, en date du 15 Décembre 2011, retenant la responsabilité d’une agence de voyages.

En effet, Madame V., une vacancière en quête d’aventure, a acheté auprès d’une agence de voyages une croisière pour sept personnes.

Malheureusement, au cours de celle-ci, cette touriste, ainsi que trois membres de sa famille, ont eu à souffrir d’une gastro-entérite.

Cette intoxication alimentaire serait imputable pleinement à l’ingestion de produits alimentaires fournis par l’organisateur de la croisière.

C’est en conséquence de ce préjudice, que Madame V. a assigné en remboursement de la prestation, et en paiement de dommages et intérêts, l’agence de voyage et son assureur, appelant en garantie l’organisateur de la croisière.

La Cour d’appel de Reims le 2 Novembre 2009, a confirmé une décision précédemment rendue par le Tribunal de Grande Instance, condamnant dès lors l’agence de voyages au versement de 10 000 euros à la victime en réparation de ses préjudices financiers et moraux.

Suite à cette condamnation, les défendeurs ont formé un pourvoi en cassation, critiquant les textes fondateurs de la décision des juges du fond.

En effet, l’agence de voyages reprochait à la Cour d’appel d’avoir fondé son jugement sur les dispositions de la loi n°92-645 du 13 Juillet 1992, fixant les conditions d’exercice des activités relatives à l’organisation ainsi qu’à la vente de voyages et de séjours.

En vertu de ce texte, l’agence de voyages est soumise à une responsabilité de plein droit quant à la bonne exécution de ses obligations contractuelles, dans le cadre de son contrat qualifié de « forfait touristique ».

En ce sens, la Haute Cour confirme une tendance consistant à considérer que la multiplicité des activités inhérentes à ce genre de voyages, implique une qualification de « forfait touristique » (Cour de cassation, Chambre Civile 1, 13 Décembre 2005, n°03-18.864), de laquelle découle une responsabilité sans faute à l’encontre de l’agence de voyages.

Instituée par l’article 23 de la loi précitée, ce régime spécial de responsabilité vaut application dès lors que la qualification de « forfait touristique » est retenue par les juges d’espèce (désormais prévu par l’article 211-13 du nouveau Code de tourisme).

La Cour, retenant un tel contrat particulier, a toutefois connu des difficultés quant aux textes applicables.

En effet, les professionnels mis en cause dans cette affaire prétendaient échapper à la responsabilité de plein droit qui découle de la loi de 1992, invoquant en application la loi n°66-420 du 18 Juin 1966 (compétente en matière des contrats d’affrètement et de transport maritime).

Cette loi consacre en effet un chapitre relatif à l’organisation de croisières maritimes, laissant la place, à l’inverse de la loi de 1992, à une responsabilité pour faute, et en conséquence, à une simple obligation de moyen à la charge du professionnel (en fonction du type du dommage subi).

C’est pourquoi, l’agence de voyages se prévalait d’un tel texte, afin de réclamer l’application de ce régime plus favorable à son égard, imposant à la victime en contre partie l’obligation de rapporter la preuve d’une faute causant directement son préjudice.

Mais, la Cour de cassation n’a pas retenu une telle argumentation, et ce au terme de deux raisonnements :

D’une part, et de façon générale, la Haute Cour semble s’orienter en faveur d’une application de la loi de 1992, se substituant à celle de la loi de 1966 (Cour de cassation, Chambre Civile 1, 18 Octobre 2005, n°02-15.487).

D’autre part, le contrat litigieux faisait expressément référence aux dispositions de la loi de 1992. Il semble ainsi évident que la Cour de cassation n’ait pu retenir une telle argumentation, excluant l’application de la loi de 1966 au profit de la loi du 13 Juillet 1992.

En conséquence, peu importe que la prestation soit contractée par la suite, ou au moment de l’acquisition du voyage, l’agence de voyages est responsable de plein droit, sans que la preuve du préjudice ne soit nécessaire d’être prouvée par la victime de l’intoxication.

Cette décision du 15 Décembre 2011 de la première chambre civile de la Cour de cassation semble plutôt sévère à l’encontre de l’agence de voyages.

Toutefois, la Cour ouvre une possibilité d’indemnisation annexe, en offrant un recours en garantie à l’encontre du prestataire organisateur de la croisière.

En effet, la responsabilité de ce dernier semble être retenue et soumise à un régime de plein droit, résultant cette fois-ci non pas de la loi du 13 Juillet 1992, mais de celle du 18 Juin 1966. (Article 49 alinéa 1er de la loi précitée).

Il est dès lors important de prendre connaissance d’une telle décision avant de boucler sa valise !

 

DIAMANTARA Marylou

Sous le contrôle de Maître Jean-Mathieu LASALARIE

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