L’indemnisation du préjudice d’anxiété des travailleurs exposés à l’amiante : une nouvelle avancée

CASS. PLEN. 2 avril 2021

Par un récent arrêt rendu le 2 avril 2021, l’assemblée plénière de la Cour de cassation a opéré un revirement de jurisprudence remarqué concernant le préjudice d’anxiété.

Qu’est-ce-que le préjudice d’anxiété ?

D’abord le « préjudice d’anxiété répare l’ensemble des troubles psychologiques, y compris ceux liés au bouleversement dans les conditions d’existence, résultant du risque de déclaration à tout moment d’une maladie liée à l’amiante » selon les arrêts de la chambre sociale de la cour de cassation en date du 25 septembre 2013 n°12-12.883 et du 3 mars 2015 n°13-21.865 et n°13-21.832.

De plus, la perte d’espérance de vie est également incluse dans le préjudice d’anxiété (3 mars 2015, n°13-21.832).

Il convient ensuite de rappeler le cadre juridique de la réparation du préjudice d’anxiété.

L’existence du préjudice d’anxiété remonte à la loi n° 98-1194 du 23 décembre 1998 de financement de la sécurité sociale modifiée par la loi n°2016-1827 du 23 Décembre 2016 article 34 ayant instauré pour les travailleurs exposés à l’amiante, sans être atteints d’une maladie professionnelle consécutive à cette exposition, un mécanisme de départ anticipé à la retraite.

Afin de bien comprendre l’enjeu de cette décision, il convient de revenir sur les faits ainsi que sur la procédure.

Faits et procédure 

En l'espèce, un salarié avait soulevé à l'occasion d'un litige l'opposant à son employeur une demande de dommages et intérêts permettant de compenser son préjudice d'anxiété résultant de son exposition à l'amiante durant plusieurs années. Ce dernier n’était cependant pas éligible à l’ACAATA (allocation de cessation anticipée d’activité des travailleurs de l’amiante) et a obtenu en 2015 une indemnité en réparation de son préjudice d’anxiété.

En effet, les juges d’appel ont ici retenu la responsabilité de l’employeur pour manquement à son obligation de sécurité. Il est vrai que l'employeur a l'obligation de prendre toutes les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé des salariés de l'entreprise.

Cependant, cette décision a été censurée en 2016. En effet, à cette période la position de la Haute Juridiction revenait à dire que « la réparation du préjudice d’anxiété n’est admise, pour les salariés exposés à l’amiante, qu’au profit de ceux remplissant les conditions prévues par l’article 41 de la loi du 23 décembre 1998 et l’arrêté ministériel » c’est-à-dire les salariés éligibles à l’ACAATA).

Néanmoins, la jurisprudence de la Haute Juridiction ayant évolué sur ce point à la suite de cet arrêt de cassation, le salarié conteste la décision de renvoi, par un même moyen contenu dans un nouveau pourvoi, déclaré recevable par l'Assemblée plénière à l'issue d'un revirement de jurisprudence.

Du point de vue substantiel, l’arrêt attaqué qui s’était conformé à la doctrine antérieure de la Cour de cassation, c’est-à-dire pas d’indemnisation du préjudice d’anxiété des salariés exposés à l’amiante s’ils ne sont pas éligibles à l’ACAATA, est cassé.

En effet, les salariés ayant travaillé dans un établissement qui n’est ni visé par l’article 41 de la loi du 23 décembre 1998 ni mentionné sur un arrêté ministériel pris en application de ce texte peuvent poursuivre la réparation d’un préjudice d’anxiété sur le fondement du droit commun de la responsabilité, la Cour de Cassation considère que cela se justifie par l’obligation de sécurité qui incombe l’employeur.

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